Cet article a été écrit par une personne ayant souffert d’anorexie, à partir de sa propre expérience. Je vais essayer de le faire relire prochainement par d’autres malades et des professionnels pour le modifier ou le compléter et qu’il corresponde mieux à d’autres guérison que la mienne.
Au début, de la guérison d’un trouble alimentaire, il est possible de ne pas avoir faim du tout. En effet, le corps n’a pas suffisamment d’énergie pour réaliser toutes ses fonctions vitales (dont celle de produire la sensation de faim et d’envie de manger). Il priorise donc l’utilisation d’énergie avec un métabolisme réduit à son strict minimum (fonctionnement indispensable du cœur, du cerveau, des poumons, …). Certaines hormones ne sont plus produites, certains organes sont « mis en veille », certaines fonctions ne sont plus réalisées, … Et cela est grave. Du fait de cette priorisation de l’utilisation d’énergie, la sensation de faim et les envies de manger peuvent disparaître. La peur et le stress peuvent aussi diminuer ces sensations. Ne pas avoir faim est donc ici un signe de mauvaise santé, un signe qu’il faut manger plus et non pas le signe pour vous qu’il faut encore plus se priver de manger pour avoir plus d’appétit. Ça c’est une illusion créée par le TCA.
Donc au début de la guérison, il faut généralement manger avec sa tête, se forcer, manger ce qu’on nous dit au minimum. Il faut nécessairement augmenter ses quantités et diversifier ses apports (avoir tous les nutriments dans son bol alimentaire) pour que le corps ne manque de rien. De plus, comme on n’a plus forcément d’envies alimentaires, il faut essayer d’expérimenter (test de nouveaux aliments, de nouvelles saveurs, de saveurs que le TCA nous a forcé à bannir, test de quantités plus importantes, de nouveaux endroits où manger, …). Manger avec sa tête peut être très désagréable et frustrant. D’autant plus que parfois, on a l’impression d’être très plein, que la digestion est longue et douloureuse. Mais ces sensations désagréables ne sont pas des signes que l’on mange trop. Ce sont des signes qui signifient que notre système digestif est encore trop faible et qu’il faut continuer de lui apporter de quoi le reconstruire. Mais il faut garder en tête que ce n’est qu’en poursuivant les efforts que les sensations alimentaires pourront réapparaître.
Quand je mangeais avec ma tête, j’avais souvent la peur de ne pas savoir reconnaître mes signaux de faim quand ils réapparaitraient. Je demandais si c’était possible qu’on m’apprenne à écouter mon corps car, ayant désappris du fait des TCA, j’avais la peur de ne plus savoir comment faire naturellement, de ne plus souvent de quoi j’avais envie et de ne plus savoir en quelle quantité. Du coup, cela entrainait la peur de manger mal, de manger trop, de ne pas savoir faire sans le plan alimentaire… Ça me faisait stresser car je n’imaginais plus ma vie sans le plan alimentaire qui me guidait à chaque repas dans les aliments et les quantités que je mangeais. A ce moment-là de la guérison, il était en fait impossible pour moi et la diététicienne de travailler sur ces signaux de faim et de satiété. Mon travail était donc d’expérimenter, de tester. Sortir un peu du plan alimentaire, même de tous petits efforts, sont très formateurs. Maintenant que les sensations alimentaires (envies et faim physique) sont réapparues, je peux vous dire qu’il est facile de reconnaître la faim. Le corps sait bien exprimer ses envies et ses besoins. Même en ayant désappris à cause du TCA, le corps sait et se souvient ! Il réapprend au fil des expériences.
Ensuite, quand on mange plus et que notre corps a plus d’énergie, qu’il comprend aussi que manger devient un peu plus autorisé mentalement, que certains aliments et certaines quantités sont un peu plus permis par le mental, le corps produira des envies de manger ou des sensations de faim d’abord de temps en temps seulement puis plus régulièrement. Ça peut être très long à revenir et il ne faut pas désespérer. Ce ne sera pas à chaque fois obligatoirement mais c’est le signe que des efforts sont faits et qu’ils payent, que le corps se reconstruit petit à petit. La sensation de faim peut apparaître suivant la quantité de nourriture ou les différents goûts qu’on lui a donné les derniers repas, les derniers jours. En effet, au début de la guérison, ce n’est généralement pas quand on se restreint qu’on a faim. La sensation de faim peut apparaître après des repas normaux ou copieux car le corps a enfin assez d’énergie et une diversité des nutriments suffisante pour pouvoir fabriquer des hormones et des envies. C’est tout à fait normal et la faim à ce moment-là est à écouter et à respecter. La sensation de faim peut aussi apparaître au cours ou à la fin du repas car de l’énergie a été assimilée par le corps et ce dernier l’utilise immédiatement pour vous demander de prolonger le repas, pour vous signifier qu’il a encore besoin d’énergie ET QU’IL NE FAUT PAS ATTENDRE LE PROCHAIN REPAS pour manger plus. Le corps a tellement été privé qu’il va en quelque sorte « profiter » de cette abondance de nourriture et de ces goûts que vous aimez. Ce n’est pas une vengeance, c’est une restauration du corps et de l’esprit suite à une privation. Enfin, la sensation de faim peut apparaître plus facilement quand on est détendu et apaisé.
Le goût et le plaisir alimentaire revienne au fil de la renutrition.
Ressentir la faim quand on ne la ressent plus depuis longtemps est agréable car enfin, le.a malade sait quand est ce que le corps a besoin de manger. Souvent en plus, des envies spécifiques apparaissent. En plus de savoir quand manger, on sait généralement aussi quoi manger, quels sont nos besoins et de quoi on a envie. Quand vous ressentez cette faim, lâchez prise et écoutez vos besoins. (En vous renourrissant, généralement, la peur de reprendre du poids s’amoindrie. Et avoir faim fait moins peur.) Les signaux comme quoi le corps veut manger sont différents chez chacun : mal de tête, baisse de la concentration, nervosité, irritabilité, pensées vers la nourriture ou le repas, sensations physiques dans le ventre, creux à l’estomac, production de salive, mouvements de langues qui imitent la prise alimentaire, …
A noter, les hormones de la faim sont produites grâce à de l’énergie (donc on a besoin d’apporter suffisamment d’énergie à notre corps pour avoir faim). Aussi, elles sont produites en partie par le tissu adipeux (qui est un organe comme un autre, aussi indispensable que le cerveau ou les muscles !). Si cet organe n’est pas en bonne santé, les sensations alimentaires seront biaisées ou absentes !
En guérison, il y a le retour de la faim physique mais aussi (et surtout) le retour de la faim mentale. Elle n’est pas à négliger et elle est tout aussi légitime que la faim physique. C’est un moyen pour notre corps d’exprimer sa faim. Tout ne fonctionne pas encore au top dans notre corps, notre organisme ne peut pas encore exprimer la faim physique à chaque fois qu’il en a besoin. Alors, notre corps envoie des pensées de nourriture, des envies de manger, des « et si je mangeais ça ? » … C’est plus facile pour lui de nous « parler » ainsi au début.
De plus, au fil de la réintégration de certains aliments (ceux interdits par le TCA) dans nos repas, au fil des expériences gustatives, le corps et le cerveau vont produire des envies de manger qui peuvent être très spécifiques, les envies de manger vont parfois être très précises. Petite précision, il n’y a pas d’aliments bons et mauvais, d’aliments à bannir (à part si on a des intolérances ou si on n’aime pas) ! Quand on a ces envies précises, il faut les écouter ! Si vous avez un aliment précis en tête, le remplacer par autre chose ne vous satisfera sûrement pas. Les envies doivent être respectées, même si elles ne sont pas considérées comme « healthy » par la dietculture. Notre corps nous guide naturellement vers des aliments qui contiennent les nutriments et de l’énergie dont il a besoin à ce moment-là. Il ne faut pas essayer de contourner ses envies, au risque d’être frustré ou en carence. Surtout pas de frustration ! Les envies seront peut-être des envies d’aliments glucidiques ou sucrés, d’aliments gras, d’aliments plaisirs. Faites confiance à votre corps et écoutez ces envies. Parlez-en à vos professionnels de santé si vous vous questionnez sur ces nouvelles sensations, ces envies et ces besoins que vous ressentez à nouveau.
Il peut ensuite y avoir une phase de faim extrême, des compulsions alimentaires de guérison, etc. Pour comprendre et vous rassurer au sujet de cette étape de guérison, vous pouvez vous référer à l’article « Faim extrême en guérison » sur ce site.
A un moment de la guérison, quand les professionnels qui vous suivent jugeront que c’est le moment opportun, ils pourront si vous le souhaitez, vous faire travailler sur les sensations alimentaires. Pour ça, il faut que vous ayez lâché la culpabilité et les barrières, que les quantités à chaque repas sont suffisantes et contiennent de la diversité et que des « fearfood » ont été réintroduits. Les professionnels sauront vous guider.
Suite à toutes ses phases, les relations à l’alimentation et au corps vont s’apaiser. Votre corps sera restauré et en forme. Votre alimentation ne vous prendra plus la tête. Tout deviendra normal et serein. Vous serez guérit !
Ici, je n’ai parlé que de la faim et des sensations qui nous poussent à manger. Je n’ai pas parlé de la satiété. Sachez quand même que la satiété est souvent plus longue à réapparaître. Don’t panic, ça reviendra !
Conseil naturopathie (c’est mieux de consulter ou au moins de demander conseil à un herboriste) : pour ouvrir l’appétit, mettre 2 cuillère à café de fenugrec dans 250 mL d’eau bouillante et laisser infuser pendant 15 minutes en couvrant. Boire cette infusion 3 fois par jour.
Vidéo Youtube :
- « Cindy Gagnol - Manger selon sa faim »
- « Cindy Gagnol - Pourquoi avons-nous encore envie de manger alors que nous avons mal au ventre ? »
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